Gestion des eaux pluviales à la parcelle ? « Pourquoi à la parcelle ? »
En matière de gestion des eaux pluviales en France, les registres débordent de textes législatifs donnant des orientations en tous sens pour maîtriser le ruissellement et préserver la « ressource » eau.
Mais dès que l’on passe à l’application, tout est laissé à la discrétion des collectivités territoriales et des établissements publics, avec une tendance très majoritaire à l’évacuation « tout tuyau »…
Pourquoi raisonner « à la parcelle » plutôt que « tuyau » ?
La fin du tout tuyau ?
L’analyse de Patrice Bideau, spécialiste en architecture bioclimatique depuis plus de 25 ans : « Quelle que soit la parcelle, petite maison ou grand immeuble, le problème majeur de notre époque, c’est qu’on imperméabilise tout, systématiquement. On accole un carré de gazon à un parking en pensant respecter la loi, un particulier se crée un jardin digne d’un magazine de décoration… Et le résultat est le même : l’eau ne s’infiltre pas. Et les tuyaux sont très vite surchargés. ».
Au cours de sa carrière d’architecte, Patrice Bideau a vu le changement climatique affecter la construction et enfler les diamètres des tuyaux sur ses chantiers, en Bretagne. « L’orage de la décennie, qui générait des inondations monstres, a fini par arriver chaque année. Les pluies torrentielles ne sont plus une exception aujourd’hui. Dans la construction, on a dû augmenter le dimensionnement des gouttières et des descentes d’eaux pluviales au fil des années. »
En réalité, dans la très grande majorité des cas, la solution « tout tuyau » ne fonctionne plus.
Ruissellement, saturation des réseaux et inondations à répétitions : gérer l’eau de pluie en aval ne suffit plus.
Non seulement les installations ne boivent plus les intempéries exceptionnelles, mais elles coûtent de plus en plus cher aux aménageurs comme aux collectivités.
Le bon réflexe serait de basculer pour chaque projet d’aménagement dans une gestion durable des eaux de pluie.
Trop cher ? Trop compliqué ? Au contraire !
Trop chère ? Trop compliquée ? La gestion des eaux pluviales à la parcelle ?
Au contraire ! Ces critiques n’ont plus grand sens aujourd’hui : que vous soyez élu local ou maître d’ouvrage, vous avez tout intérêt à aller recueillir la goutte d’eau au plus près de son point de chute, à la parcelle. Vous allez y gagner du temps, de l’argent, et moins de cheveux blancs.
Gestion des eaux pluviales : un tas de textes prescriptifs, peu de
contraintes ?
Depuis la Loi sur l’Eau de 1992 (renforcée en 2006), la gestion de l’eau de pluie apparaît dans tout un tas de textes d’orientations, qui encouragent à préserver à la fois le milieu récepteur naturel et la ressource eau en elle-même.
Mais, au niveau national, du Code Civil au Code de l’Urbanisme, le décor législatif reste flou.
Parmi les textes de gestion des eaux
On trouve par exemple :
– Le Code Général des Collectivités territoriales (Article L2224-10) qui demande aux communes de délimiter les zones où des mesures doivent être prises pour limiter l’imperméabilisation des sols et pour assurer la maîtrise du débit et de l’écoulement des eaux pluviales et de ruissellement.
– Le Code de l’Environnement (Article L. 211-1 et Article 214-1 – 2.1.5.0), qui prévoit une gestion « équilibrée et durable de la ressource en eau », notamment par la prévention des inondations. Et qui délimite une surface à partir de laquelle le projet doit être soumis à déclaration ou à autorisation auprès de la police de l’Eau locale.
À l’échelle locale, l’Arrêté du 21 juillet 2015 introduit le principe de gestion des eaux pluviales « le plus en amont possible, pour limiter les apports d’eaux pluviales dans le système de collecte », avec la mise en place d’un système de traitement des eaux avant leur rejet en milieu naturel. Soit un encouragement à la gestion à la parcelle, qui ne va pas beaucoup plus loin.
Une contrainte bien plus récente
La contrainte, pour cette gestion des eaux, est en fait bien plus récente. Elle vient des nouvelles réglementations comme la Loi ALUR, la Loi Biodiversité, ou les documents d’urbanisme réglementaire type SAGE et SADGE, qui exigent des responsables de l’aménagement qu’ils prennent en compte l’imperméabilisation des sols et la gestion des eaux de pluie dès le départ et de façon durable.
Intégrer la gestion des eaux à la parcelle dès le départ vous fait gagner du temps
Si les textes sont si peu contraignants jusque-là, quel intérêt auraient les établissements publics et les aménageurs à essayer de s’y plier ? En réalité, la législation est en train de changer de bord : elle entre aujourd’hui dans une nouvelle logique contraignante de durabilité et de lutte contre l’imperméabilité des sols.
La tendance va donc dans le sens de la création de villes poreuses plus que de terrains ultra imperméables et du tout béton.
Aussi, vous soumettre à ces règlements plutôt que de continuer à nager contre le sens du courant devrait désormais vous faire gagner du temps.
— Pour l’aménageur, ne pas prendre le dossier de l’eau au sérieux, c’est s’exposer au risque de voir son projet rejeté ou suspendu par la collectivité au titre de la Loi sur l’Eau. Et cela peut coûter très cher…
— Les collectivités locales ont tout intérêt à encadrer et contrôler sérieusement la gestion des eaux à la parcelle (en amont) pour éviter la conséquence classique des projets d’urbanisme jusqu’ici : risque d’inondation, ruissellement, contamination des eaux et effet îlot de chaleur en période de canicule… Phénomènes qui se multiplient avec les changements climatiques récents, et qui vont exiger énormément d’entretien et de longs travaux de remise en état.
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Les principes de la gestion durable : plus simple qu’on ne le pense
Quand on parle de gestion des eaux à la parcelle, on pourrait croire qu’on parle chinois. Or, il s’agit seulement de changer de mode de pensée. Il s’agit d’intégrer, dès la conception du projet, quelques principes simples qui pourraient lui sauver la vie par la suite :
–Zéro ruissellement et zéro rejet des petites pluies (absorption au moins des 10 premiers mm),
– Pas de contamination des eaux ou de rejet direct dans les systèmes d’assainissement,
– Pas de nouvelle imperméabilisation des surfaces,
– Gestion des eaux de pluie au plus proche de leur zone de chute.
« Infiltrer et récupérer les eaux de pluie, ce n’est que du bon sens », raisonne Patrice Bideau. « Toitures plates ou courbes, nos constructions ne sont pas faites pour résister à cette nouvelle pression météorologique constante. Et les assurances risquent d’abandonner très vite la partie. Construire en fonction de la réalité climatique, ce n’est en fait que du bon sens. Rien de plus compliqué. ».
Quelques contraintes à respecter
Il faut aussi intégrer au projet d’aménagement les contraintes inhérentes à la zone de construction comme :
– Les contraintes géotechniques (exutoire, pente, situation de la parcelle…)
– Les capacités naturelles d’infiltration ou d’écoulement des sols
– Les contraintes climatiques : s’agit-il d’une zone à risque de fortes précipitations ?
Pour quels résultats ?
À ce stade-là, vous cherchez encore ce qui va vous faire gagner du temps dans cet écheveau de contraintes et de principes.
En réalité, vous avez déjà gagné un temps fou en intégrant à un nouveau projet d’aménagement un comportement durable avec les eaux de pluie. Vous lui avez garanti une bonne intégration dans son milieu géologique et climatique, vous avez imaginé une bonne résilience pluviale, et donc une durée de vie supérieure et un coût très amoindri. Si, si !
Résultats techniques
Sur le plan des résultats techniques, voici tout ce que vous aurez généré en intégrant la gestion des eaux de pluie à la parcelle :
- Moins de ruissellement en surface
- Donc moins de risque d’inondation
- Diminution des coûts d’entretien et de réaménagement des réseaux d’assainissement
- Moins de pollution et de contamination des eaux et des nappes
- Régénération du cycle naturel de l’eau
- Filtration des eaux et nettoyage des nappes phréatiques
- Maintien de la biodiversité des milieux aquatiques
- Limitation des îlots de chaleur l’été
- Amélioration du cadre de vie urbain
Résultats financiers
Sur le plan financier, vous allez aussi réaliser des économies.
En misant sur des solutions vertes et durables, l’investissement pour un projet d’aménagement urbain (voirie, parking, toiture végétalisée…) s’avère moins coûteux que vous ne l’auriez prévu. Par ailleurs, le cycle vertueux de l’eau pluviale dans les sols rendus perméables garantit à ces nouveaux ouvrages une longévité qui réduit aussi les coûts de maintenance.
Un groupe de travail du Graie a notamment pu montrer que la gestion à la source (« à la parcelle ») plutôt qu’en aval par un réseau souterrain qui renvoie ce qu’il peut vers un bassin exutoire (et qui sature et déborde régulièrement) s’avère très rapidement bien plus rentable pour la collectivité comme pour l’aménageur.
Par quelles solutions allez-vous y arriver ?
Selon l’intensité du risque de pluies de votre site, vous allez pouvoir jongler avec un panel de solutions de plus en plus faciles à mettre en place, et de plus en plus durables. L’objectif est de laisser au passé l’option « tout tuyaux » et d’avancer dans le sens
d’une gestion verte des eaux pluviales à la parcelle.
Ces solutions vont de la surface végétalisée – qui infiltre directement dans le sol – à la construction de collecteurs, en passant par les noues drainantes. En recourant à l’une ou à l’autre, voire en mélangeant ces différentes options, vous pouvez parvenir à infiltrer tous les types de précipitations (des petites pluies aux fortes intempéries d’intensité exceptionnelle) et à réduire le coefficient de
ruissellement à zéro.
Plus vous tirerez vers le vert dans votre choix de solution d’infiltration, plus vous garantirez à votre projet un équilibre non seulement en périodes de fortes pluies mais aussi pendant une vague de chaleur. La végétation joue aussi un rôle essentiel dans la régulation de la chaleur, notamment grâce au phénomène d’évapotranspiration. Vous avez donc tout intérêt à vous intéresser au plus vite aux solutions d’infiltration naturelle.
Pour en savoir plus sur ces solutions, demandez votre documentation…