Un toit doit être porté par la charpente de la maison. Il faut donc s’assurer que la structure qui porte le complexe végétalisé peut supporter sans problème celui-ci dans tous les cas de figure. Et s’il pleut beaucoup ? Et si la récolte a été excellente ? Et si les jardiniers produisent plus que prévu ?
Voici comment avoir réponse à toutes ces questions.
Poids de la toiture végétalisée : les principes
Sans entrer dans le détail, il faut tenir compte, dans le calcul du poids que devra supporter la structure :
- des charges permanentes (poids du complexe isolation-étanchéité, en d’autres termes : masse du pare-vapeur, de l’isolant et du revêtement d’étanchéité).
- des charges dites d’exploitation (soit le poids de la neige dans certaines régions, soit le chiffre de 100 daN/m² donné par la norme NF P 06-001).
Le bon sens indique donc qu’au-delà des charges permanentes, ce qui relève du potager doit plutôt entrer dans ce deuxième type de charge et ne pas excéder la norme. Il convient donc de s’intéresser de près à la façon dont on « exploite » un potager.
Le problème le plus important en matière de poids est donc logiquement celui du substrat dans lequel vont pousser les légumes. Plus on voudra reproduire les conditions d’un potager classique avec de la terre, des amendements, etc., plus on sollicitera la structure. Or, la terre pèse lourd.
« Les charpentes qui supportent les toits sont en bois, en acier ou en béton, explique Pierre Georgel, président d’ECOVEGETAL. Quand on a du bois ou de l’acier, on doit être prudent. Les marges de calcul deviennent alors plus étroites que dans le cas du béton. «
Le risque est donc que le toit végétalisé vienne à s’écrouler parce que les calculs auront mal été faits et qu’ils auront négligé certaines conditions extrêmes ou certains risques inhérents à la cohabitation du minéral et du végétal (évacuations bouchées, surcroîts de volumes d’eau, etc.).
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Calculs dans les conditions extrêmes
« Chez Ecovegetal, on contrôle systématiquement tous les substrats, explique Pierre Georgel dans la vidéo ci-après. On a un laboratoire. Et on mesure les substrats selon le protocole défini par l’Adivet (Association des Toitures et façades végétales). On mesure donc le poids de ce substrat à CME, capacité maximale en eau. Et ensuite, toutes les deux heures, on mesure combien d’eau s’en va et comment évolue le poids. Les ingénieurs structure reçoivent nos poids CME et on est donc certain du poids que devra supporter la structure. «
Cas du potager
Dans le cas du potager sur le toit, il faut anticiper sans doute plus que pour toute autre culture, le cycle de la végétation. Dans ce cas précis, on cherche à ce qu’elle produise de la matière (biomasse) et qu’elle en produise beaucoup, puisque l’on veut pouvoir récolter et manger.
« Sur les toitures en acier nervuré, il faut faire attention aux apports en matière organique qui enrichissent le sol et qui produisent, explique Pierre Georgel, président d’ECOVEGETAL qui est aussi, rappelons-le, architecte. Il faut faire attention aussi à cette idée contradictoire qui est de dire « parce que je prélève des légumes, j’enlève du poids ». Quand vous cultivez sur toiture avec du substrat adapté comme celui d’ECOVEGETAL, par exemple des pommes de terre, vous vous rendez compte que le racinaire de ces plantes est cinq fois plus développé que s’il était en plein terre. Et ces racines, une fois que l’on a récolté et enlevé les pommes de terre, elles restent, elles. Tout cela, c’est de l’azote qui a été fixé. Il y a donc un poids qui a été ajouté.«
Comment faire pour mesurer cette production de biomasse et vérifier qu’elle ne pèse pas trop lourd sur le toit ou la terrasse végétalisée ?
ECOVEGETAL a mis au point pour cela un protocole pour mesurer une fois par an, chaque année, le substrat et s’assurer que le poids sur la toiture reste conforme aux possibilités de la structure et qu’il reste adapté aux plantes que l’on souhaite y voir pousser.
On le comprend, il y a là un enjeu pour l’architecte et le maître d’ouvrage : découvrir l’art du jardinage et du maraîchage sur un toit, se départir de bien des idées fausses (l’air est pollué en ville, il n’y aura pas assez de place pour produire beaucoup, cela amusera quelques « bobos parisiens » mais n’intéressera jamais de vrais agriculteurs) et adapter la gestion du bâtiment à ces nouveaux usages.
Ceux-ci s’annoncent en effet toujours plus importants et toujours plus nombreux avec le boom de l’agriculture urbaine qui s’amorce.
« Il faut ainsi s’assurer que le maître d’ouvrage ou le propriétaire du bâtiment restera le même propriétaire, ajoute Pierre Georgel. Ou, s’il quitte les lieux, s’assurer qu’il transmettra bien aux nouveaux propriétaires ces contraintes de gestion, afin d’éviter de se retrouver avec des surcharges. »
Cultiver sur un toit n’est en effet pas, on le comprend, cultiver comme partout ailleurs.
Autre exemple : les récoltes. Un bac où l’on va planter 30kg de pommes de terre peut très vite se mettre à produire beaucoup (la pomme de terre que l’on a l’habitude de voir cultivée sur de vastes étendues se développe également très bien en hauteur, cultivée dans des bacs en forme de tours).
« On peut se retrouver avec un poids de 300 ou 400 kg sur 1mètre carré, explique Pierre Georgel. Si la structure n’est prévue pour supporter que 250kg en charge permanente (support + substrat+personne qui cultive), vous avez un problème. «
Comment tenir compte du ruissellement ?
Il faut en outre tenir compte du ruissellement et de la façon dont le toit est conçu pour gérer ce ruissellement.
« On peut avoir de fortes pluies qui arrivent, ajoute Pierre Georgel. Il y a des calculs pour estimer le volume d’eau pluviale par mètre carré de toiture. Et bien entendu, il y a des sécurités : on a des surverses qui permettent à l’eau de s’évacuer si jamais une descente d’eau pluviale est bouchée. »
Le problème est en effet d’abord de ne pas ajouter de volumes d’eau pour des raisons de mauvais fonctionnement. Pour éviter cela et s’assurer que les évacuations ne se bouchent pas, ECOVEGETAL prévoit des contrats d’entretien qui permettent de vérifier les points sensibles et d’éliminer par anticipation les risques.
« On va notamment éliminer tous les dépôts, explique Pierre Georgel. On peut avoir un arbre au loin qui va apporter de la matière à chaque coup de vent, ou pire, des fois, on a des gens qui jettent des choses sur les toits. »
Mais il ya aussi un paradoxe : l’objectif n’est pas forcément de favoriser l’évacuation rapide de l’eau.
La végétalisation des terrasses et des toitures n’a pas pour vocation d’entrer en conflit avec l’objectif de maîtrise des ruissellements. Au contraire. Elle doit y contribuer.
« Quand tout fonctionne parfaitement, explique Pierre Georgel, il faut que la toiture végétale soit capable de retenir des eaux pluviales, de ralentir leur écoulement pour qu’il y ait moins d’inondations. »
Puisque les calculs de structure ont été fait à CME (capacité maximale en eau), cela n’ajoute aucune contrainte de poids.
Sauf peut-être pour la prise en compte des éléments que l’on peut ajouter pour optimiser ce ralentissement des écoulements.
« Chez ECOVEGETAL, nous faisons un énorme travail pour développer des drainages, des nattes à rétention d’eau et ralentir le temps d’écoulement de l’eau ».
En consultant cette page sur la rétention des eaux pluviales , on se rendra compte que le poids de ces éléments est un supplément négligeable. On peut donc réellement concilier les deux objectifs.
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